Le gouvernement vénézuélien a été l’un des premiers à dicter la mesure, presque en même temps que l’Italie, l’Espagne, puis la France et, quelques jours plus tard, l’Argentine.

en transportant de l’eau et des fruits.
On ne peut déjà plus sortir de la maison sans masque. Tout a changé. Cela semble irréel de voir tous ces gens avec des masques, un mauvais rêve dont on veut se réveiller. Son utilisation est obligatoire depuis que lundi dernier, 16 mars, Nicolas Maduro a décrété la mise en quarantaine totale.
Tout s’est passé très vite : après l’annonce de l’urgence face à la pandémie de coronavirus le jeudi 12 mars, le lundi 16 mars, la quarantaine était décrétée. Twitter nous rappelle chaque jour l’évolution de la situation : au moment d’écrire ces lignes (le 22 mars), nous sommes le 6e jour, et il y a 70 cas confirmés de covid-19, 15 personnes ont récupéré et 2 sont dans un état critique.
Le gouvernement vénézuélien a été l’un des premiers à dicter la mesure, presque simultanément avec l’Italie, l’Espagne, puis la France et, quelques jours plus tard, l’Argentine. La mesure est apparue comme une prévention radicale dès l’heure zéro, même avec peu de cas, dans le but de prévenir l’épidémie incontrôlable.
Dès le début, le pays a pu compter sur plusieurs avantages. D’abord, son architecture géopolitique et les alliances pivilégiées avec Cuba et la Chine, les deux pays qui ont le plus grand déploiement médical mondial depuis le début de la pandémie.
De plus, la société vénézuélienne a connu de nombreux épisodes de crise et d’affrontements catastrophiques ces dernières années. Elle a connu la pénurie, l’hyperinflation, la violence politique, l’émigration, des événements collectifs qui ont généré des réflexes et des capacités face à l’adversité.
Cela lui a permi de développer des structures d’organisation populaire qui sont maintenant mises en place face à la pandémie. L’une d’elles, par exemple, est le Comité local d’approvisionnement et de production qui, au moment de la quarantaine, se mobilise pour garantir les opérations d’approvisionnement alimentaire subventionnées par le gouvernement.
Les inconvénients de cette situation sont essentiellement au nombre de trois. Premièrement, il s’agit d’une économie sous blocus. Un éditorial publié vendredi dans le Washington Post a clairement indiqué que les États-Unis utiliseront leur blocus comme un outil de chantage face à la pandémie.
Il y est dit blanc sur noir que si Maduro veut que les « sanctions qui étranglent l’industrie pétrolière vénézuélienne » soient levées, il doit « compter sur la coopération de M. Guaidó pour obtenir une aide internationale, tout en s’engageant à organiser des élections présidentielles et législatives sous supervision internationale une fois la crise passée ».
Le même éditorial prédit que le Venezuela « pourrait devenir un nouvel épicentre du covid-19 », et défend la décision du Fonds monétaire international de ne pas accepter le prêt de 5 milliards de dollars demandé par Maduro dans le cadre de l’allocation spéciale de l’agence pour cette crise.
Deuxièmement, la pandémie menace un système de santé qui a connu des succès, comme le développement d’un premier niveau de santé préventive, avec le système Barrio Adentro, et d’un second niveau, avec les Centres de diagnostic intégral. Les deux ont subi des revers ces dernières années, mais ils sont toujours en activité et sont essentiels dans ce scénario.
La plus grande difficulté se situe au troisième niveau : les hôpitaux. Les problèmes y sont divers, comme, dans certains cas, l’approvisionnement en eau. Face à cette situation, les annonces de coopération avec Cuba et la Chine se sont multipliées, avec l’arrivée de médecins et de matériel pour faire face à une urgence par rapport à laquelle, cela a été démontré, aucun système de santé au monde n’était préparé.
Liés à la crise pandémique, les prix du pétrole ont chuté au point critique où les coûts de production dépassent le prix de vente. Dans le cas du Venezuela, ce prix est encore plus bas en raison de l’impact des sanctions sur ceux qui continuent à commercer avec l’industrie pétrolière vénézuélienne.
Cet ensemble de variables explique en partie pourquoi le gouvernement a opté pour une quarantaine partielle puis totale. L’autre partie, centrale, est que le diagnostic auquel le gouvernement est parvenu, sur la base de sa propre analyse et des expériences d’autres pays, est que la meilleure méthode est la quarantaine. D’autres gouvernements qui ont refusé de prendre cette mesure, comme le gouvernement britannique, dirigé par Boris Johnson, arrivent progressivement à cette conclusion.
La question est posée depuis le début : combien de temps la quarantaine peut-elle et doit-elle être maintenue ? Un point lié à la question encore sans réponse de la durée de la pandémie, c’est-à-dire du moment où un vaccin apparaîtra.
Pour l’instant, le pays est plongé dans un scénario sans précédent. Les images de la ville montrent une circulation réduite, peu de gens dans les rues, la police dans de nombreux endroits, tous avec des masques, des magasins fermés, à l’exception des pharmacies et de ceux qui vendent de la nourriture. Une ville à l’arrêt autant que possible.
Comment vont s’y prendre ceux qui vivent au jour le jour ? C’est la question qui se pose dans tous les cas de quarantaine. Elle fait partie de la grande difficulté et est vécue avec plus d’inquiétude dans un pays d’Amérique latine que dans une structure étatique, économique et sociale d’Europe occidentale.
Pour l’instant, l’objectif est d’arrêter l’avancée de Covid-19, de consolider le pays avec toutes les structures organisées de l’Etat et avec les soutiens internationaux, et d’espérer que le résultat sera conforme aux attentes.
Marco Teruggi
Source : https://www.pagina12.com.ar/ Traduction : Venesol