La CIDH a accepté la plainte déposée par l’ancien président Fernando Lugo contre l’État paraguayen pour le coup d’État parlementaire dont il a été victime. Contexto s’est entretenu avec Ricardo Canese, membre paraguayen du Parlasur, qui a souligné l’importance de cette décision et a évoqué les intérêts qui se cachaient derrière ce coup d’État.

On a appris ce mardi que la Commission interaméricaine des droits humains (CIDH) de l’Organisation des États américains (OEA) a accepté une plainte contre l’État paraguayen déposée par l’ancien président du Paraguay Fernando Lugo pour le coup d’État parlementaire qu’il a subi en 2012.
Pour comprendre les implications de cette décision, Contexto a interviewé Ricardo Canese, membre du Parlement du Mercosur (Parlasur) pour le Front Guasú du Paraguay.
Pour Canese « c’est une étape extrêmement importante que la Commission interaméricaine des droits de l’homme de l’OEA ait admis la plainte contre l’État paraguayen pour la violation des droits humains dans le cas du coup d’État contre Fernando Lugo le 22 juin 2012 ».
« La CIDH ne retient pas les cas qui ne bénéficient pas d’un grand soutien, et ce qui ici est d’autant plus remarquable, c’est que Fernando Lugo représente un secteur progressiste alors que la direction de l’OEA est conservatrice. Il s’agit donc d’un grand triomphe, car on reconnaît que les droits humains de Fernando Lugo et de tout le peuple paraguayen ont pu être affectés par ce procès express au cours duquel le président a eu moins de seize heures pour se défendre, alors que pour une infraction au code de la route, dans de nombreuses cas, on a jusqu’à cinq jours de délai pour se défendre .
Canese rappelle que « le coup d’État contre Lugo était le début d’une série de coups d’État contre des gouvernements progressistes dans la région ».
« Le Paraguay était peut-être le maillon le plus faible, aussi, lorsqu’une majorité conservatrice et réactionnaire l’a emporté au Congrès paraguayen, les forces de l’empire américain, ainsi que les oligarchies du Paraguay et d’Amérique latine, ont réalisé le coup d’État parlementaire ».
« Pour les secteurs réactionnaires et conservateurs du Paraguay, il était important d’interrompre le processus progressiste mené par Fernando Lugo dont le gouvernement, encore à ce jour, est celui dont toute la population se souvient le mieux. Même les sondages effectués par la droite doivent le reconnaître. Le gouvernement de Lugo a amélioré la santé publique, l’éducation, les soins aux personnes âgées et aux secteurs les plus vulnérables et, bien sûr, la souveraineté énergétique avec l’accord historique entre Lugo et Lula sur le barrage d’Itaipu. Tout cela dérangeait l’oligarchie régionale, en particulier l’oligarchie paraguayenne et, bien sûr, l’empire lui-même. Les représentants de ces intérêts locaux et régionaux qui se voyaient écartés ont pris la décision de faire un coup d’État parlementaire sans même s’occuper de la forme, car donner seize heures à un président de la République pour se défendre est un scandale ».
« De plus, on sait aujourd’hui que le massacre de Curuguaty était un complot orchestré par ces mêmes milieux qui ont provoqué le coup d’État parlementaire. Lors de ce massacre, des armes de gros calibre ont été utilisées, armes que les paysans qui se battaient pacifiquement pour un morceau de terre n’avaient pas. Dix-sept personnes ont été tuées avec des armes de gros calibre, comme l’ont confirmé les tribunaux ».
Enfin, Ricardo Canese fait remarquer que « pour toutes ces raisons, la reconnaissance par la CIDH des graves violations des droits humains commises à l’encontre de Fernando Lugo et du peuple paraguayen est une étape extraordinairement importante, non seulement pour les droits de l’homme et la démocratie au Paraguay, mais aussi pour toute la région ».
Hector Bernardo