Quelques jours après avoir été élue présidente de la République, bien qu’elle n’ait pas encore été proclamée comme telle par le Conseil National Electoral (CNE), l’entourage de Xiomara Castro a fait connaître officieusement une proposition en trente points pour ses cent premiers jours de gouvernement. Cette proposition donne un aperçu de la voie que suivra le gouvernement d’un mouvement politique et social qui lutte depuis le 28 juin 2009 — date du coup d’État qui a renversé le président Manuel Zelaya — contre les pouvoirs qui ont installé un gouvernement de facto, trois gouvernements nationalistes et organisé une fraude scandaleuse en 2017.

Certains des points proposés concernent clairement la base du parti et de l’alliance qui a soutenu Castro ainsi que la population la plus durement touchée par les politiques néolibérales appliquées ces dernières années. D’autres envoient des messages au patronat dont une grande partie a appelé à voter pour Castro et d’autres encore s’adressent à l’étranger, et en particulier aux États-Unis. Certains points sont destinés à faire comprendre qu’il y aura une collaboration sur des sujets sensibles comme la corruption et l’économie qui ont causé l’augmentation de la migration clandestine et d’autres, moins amicaux, annoncent l’établissement de relations diplomatiques et commerciales avec la Chine.
Ce dernier point, cependant, selon le futur vice-président Salvador Nasralla et le député élu Hugo Noé Pino, sera soumis au Congrès National. C’était, en réalité, un clin d’oeil à Washington avant l’élection, un signe de la prudence qui caractérisera le nouveau Gouvernement dans ses relations avec le Nord.
Arriver au pouvoir a coûté au Parti Liberté et Refondation (LIBRE) 12 ans de lutte permanente. LIBRE a participé pour a première fois aux élections générales en 2013. Depuis, la route a été longue, tortueuse et n’a pas manqué d’âpres discussions, de durs affrontements internes et avec la diaspora des dirigeants, des cadres moyens et de base. Cependant le nouveau parti a été considéré comme le seul capable d’expulser du palais présidentiel le Parti National au pouvoir, un parti usé par douze ans de gouvernement, par son autoritarisme, par la résistance populaire à certaines de ses politiques et surtout par la corruption et par ses liens avec le trafic de drogues.
Dans ce cadre, la proposition vise d’abord à abroger les lois les plus controversées de ce que Xiomara appelle une « dictature. » ainsi, la loi du Conseil de Sécurité et de Défense, la loi sur les Secrets, la loi sur les Écoutes, la loi sur les Zones d’Emploi et de Développement Economique (ZEDE) et d’autres similaires « approuvées lors de l’hémorragie législative de 2013 destinée à instaurer la dictature, » iront à la poubelle.
Le deuxième point est également d’une grande importance et pourrait générer des problèmes dans une partie de la société ainsi qu’à Washington, en envisageant d’organiser une consultation populaire pour que le peuple décide s’il veut une Assemblée Nationale Constituante. Cela a été précisément l’un des prétextes invoqués en 2009 pour renverser Manuel Zelaya, le mari de Castro. Ce point sera reporté afin de créer un consensus entre les forces politiques et les représentants de la société civile.
Les aspects destinés aux bases et à l’ensemble de la population la plus marginalisée proposent de baisser les salaires élevés et disproportionnés des fonctionnaires ainsi que toute dépense onéreuse et superflue, de vendre l’avion présidentiel et les véhicules de luxe appartenant à l’État. Une baisse du prix des combustibles et la réorganisation des entreprises d’Etat sont également proposées.
Cette proposition assure en outre, qu’aucun impôt ne sera imposé au peuple hondurien, en particulier aux secteurs de la production et du commerce et « encore moins aux pauvres. » elle indique, de plus, que les impôts qui ont touché le consommateur final et la compétitivité du secteur patronal seront supprimés mais qu’on imposera des « engagements de contribution aux grands capitaux financiers » et que ces apports financeront des bourses d’études et des emplois pour les jeunes.
L’une des mesures les plus attendues par les partisans de la future présidente est l’amnistie immédiate pour les prisonniers politiques et « une grâce pour les prisonniers condamnés indûment pour avoir protesté pour défendre les droits humains et les ressources naturelles. » Concernant l’assassinat de Berta Cáceres et de Margarita Murillo, il est prévu de poursuivre les procès pour arriver jusqu’aux auteurs intellectuels, ce qui risque d’être compliqué, étant donné le pouvoir que possèdent les instigateurs présumés.
Dans cette optique, la protection de l’environnement et l’abrogation des permis aux entreprises minières, hydroélectriques et forestières accordés de façon contestable par les autorités sortantes sont annoncées. La proposition indique également l’engagement à « travailler pour la réparation des dommages causés par les violations de leurs droits des victimes de la violence politique, des personnes assassinées lors de la fraude électorale de 2017 et des féminicides. »
Dans ce cadre et en tant que l’un des points les plus importants, est annoncée « l’installation d’une Commission Internationale contre la Corruption et l’Impunité (CICIH). Cette Commission sera créée par le Gouvernement du Honduras avec le soutien de l’Organisation des Nations Unies. » Ainsi, le Honduras reprend le chemin abandonné par le Guatemala de créer un organe indépendant international dont la finalité sera de soutenir les institutions de l’État dans l’enquête sur les délits commis dans le pays qui, au Guatemala, s’est achevée par l’emprisonnement de l’ancien président Pérez Molina et de l’ancienne vice-présidente Roxana Baldetti.
D’autres points évoquent le problème des migrants et leur besoin en matière de regroupement familial, celui des enseignants et de la renégociation du statut d’enseignant. Sont également abordés une augmentation du salaire de base, des bourses pour les secteurs les plus démunis et l’abrogation des lois préjudiciables aux intérêts des secteurs les plus vulnérables comme la loi fondamentale sur l’éducation, la loi sur l’emploi temporaire et la loi sur la sécurité sociale.
Les points contenus dans cette proposition indiquent que le nouveau gouvernement entamera son administration avec force et détermination. Le peuple hondurien espère que ces promesses seront tenues de manière efficace et effective, et que le pays s’engagera sur une voie qui permettra d’apercevoir des horizons de progrès et de bien-être.
Dardo Justino Rodrígue
analyste, communicateur et consultant indépendant
pour des institutions et organisations internationales.
Directeur national de Presagio Consulting Honduras.