S’il est vrai comme le dit le président Alberto Fernández que « pendant quatre ans il n’y aura pas de remboursement », cela ne signifie pas qu’il y a eu une réduction ou une diminution de la dette, mais au contraire, que la dette va croître avec les intérêts qui continuent à courir.

Quel étrange pays que l’Argentine. Si tu voles un poulet pour que tes enfants puissent manger, tu peux aller en prison pendant plusieurs années ou être abattu pour ce vol. En revanche, si tu voles et fais fuir l’argent volé vers des paradis fiscaux, à hauteur de 44 milliards de dollars, non seulement tu restes impuni, mais tu peux représenter ta candidature à la présidence de la Nation.
Dans un pays où le taux de pauvreté dépasse 52%, où des milliers d’enfants sont dans un état de malnutrition égal ou pire que dans des pays africains, l’accord avec le FMI, instrument des États-Unis pour soumettre nos peuples, signifie mettre ce même pays à genoux devant les organisations multilatérales et les fonds vautours. Plombé par des irrégularités, le dernier prêt du FMI à l’Argentine met en cause à la fois le Fonds et l’ancien président Mauricio Macri.
Il est évident que l’opposition soutient l’accord du FMI, car cette mesure lui permet de rester impunie face à une dette criminelle, une dette contractée en violation des propres règles du Fonds, comme le fait qu’elle ait été accordée à des fins électorales et non pour aider le pays en crise. Macri et tous les criminels en col blanc se sont enrichis de manière illicite grâce à une dette qui ne s’est jamais convertie en hôpitaux, écoles, créations d’emplois, logements ou des mesures pour les plus vulnérables. Au contraire, le gouvernement néolibéral de Macri a endetté le pays pour 100 ans et a contracté non seulement la plus grande dette de l’histoire, mais les devises étrangères obtenues ont également été siphonnées vers des paradis fiscaux, et à ce jour, les auteurs de cette escroquerie n’ont pas été traduits en justice.
Mais il est frappant que le gouvernement actuel, pour lequel beaucoup d’entre nous ont voté pour mettre fin à la honte de la mafia macriste, soit l’exécuteur d’un accord qui légitime et nationalise la dette privée pour que le peuple argentin la paie. Le même gouvernement qui a promis pendant la campagne électorale d’enquêter sur les origines d’une dette illégitime afin de ne pas la payer aux dépens de son peuple, se vante aujourd’hui d’une victoire (à la Pyrrhus) pour être parvenu à un « bon accord » avec l’organisation.
S’il est vrai, comme le dit le président Alberto Fernández, que « pendant quatre ans, il n’y aura pas de remboursement », cela ne signifie pas qu’il y ait eu une réduction ou une diminution de la dette ; au contraire, la dette va croître avec les intérêt dus, qui, en plus d’être faramineux, auront alors un impact économique sans précédent pour notre pays.
Il est regrettable que certains collègues, fonctionnaires et/ou journalistes aient tendance à justifier ou plutôt à se résigner à la fausse théorie du « moins mauvais » ou du double discours sans aucun argument de critique de l’intérieur et de flatterie de l’extérieur.
Notre Amérique traverse une conjoncture très compliquée, qui a un besoin urgent d’une fiabilité politique à travers des constructions ou des espaces collectifs allant de la base vers le haut. La configuration des forces dépend exclusivement du peuple mobilisé et conscient, contrairement à ces politiciens qui depuis des années appellent à « rester à la maison » et démobilisent par le fait même leurs bases.
En bref, la dette de quelques escrocs qui ne seront jamais traduits en justice est devenue une dette qu’aura le peuple à payer.
L’auteur de ces lignes ne parle pas de ne pas payer la dette, mais simplement d’enquêter sur son origine, qui est non seulement illégale, mais aussi illégitime, car l’argent n’a jamais été affecté au multiples travaux publics et besoins du pays. Au contraire, des millions de dollars ont été siphonnés pour gonfler les comptes offshore de politiciens, banquiers et hommes d’affaires amis de l’ancien président.
Bien plus que des célébrations et des réjouissances infondées, il y a de nombreuses inconnues à résoudre : comment faire en sorte que cet accord ne se traduise pas directement ou indirectement par des ajustements de prix, des réformes du travail, les salaires des enseignants et des retraités, des réductions des dépenses publiques qui touchent les écoles, les hôpitaux, la sécurité sociale, le logement des plus vulnérables ?
Comment éviter les audits et les modèles dictés de l’étranger, les taxes, les augmentations disproportionnées de l’électricité, du gaz et d’autres produits de première nécessité, au nom d’une réduction du déficit budgétaire toujours évoquée ?
Comment se fait-il que les mêmes qui, en 2007 (sous la présidence du camarade Néstor Kirchner) ont chassé le FMI d’Argentine, se vantent aujourd’hui d’avoir obtenu « un accord dans les limites du possible », selon les déclarations du ministre de l’économie Martín Guzmán ?
Loin des applaudissements complices que de nombreux milieux réservent au gouvernement, nous devons être constants dans la critique constructive, dans le soutien des luttes et des revendications qui viendront de ceux d’en bas contre l’ajustement salarial, en faveur de notre souveraineté, si compromise aujourd’hui, contre le verticalisme obséquieux qui approuve tout et ne remet rien en question, en exigeant au niveau national et international le jugement et la punition des pilleurs financiers de notre pays. Pour cela, il nous faut construire un collectif social qui nous permette à tous de converger dans un grand front de libération nationale et sociale.
Ce front devrait appartenir à tous (référence au Frente de Todos, la coalition au gouvernement), et non pas comme le gouvernement actuel, qui est devenu aujourd’hui le front de quelques-uns.
Carlos Prigollini