Des Zones franches pour relancer l’économie du Venezuela… (?)

Le Venezuela cherche à diversifier ses sources de financement. À cette fin, l’Assemblée nationale a récemment approuvé la loi organique sur les Zones franches (Zonas Económicas Especiales), un instrument destiné à accroître les revenus du pays et à encourager l’« indépendance économique », selon ses défenseurs.

Bien que la loi ait été approuvée par consensus par les bancs du gouvernement et de l’opposition (malgré, cependant, le vote négatif des députés communistes), elle établit les conditions d’un régime fiscal exceptionnel que certains secteurs considèrent avec scepticisme.

Néanmoins, la priorité du gouvernement est claire : soutenir la reprise et la diversification de l’économie pour contrer le sévère régime de sanctions imposé par les États-Unis et l’Union européenne qui affecte l’appareil productif du pays depuis des années.

Les députés approuvent la loi sur les zones franches | asambleanacionalvenezuela.org

Les sanctions imposées au Venezuela et la chute du prix du pétrole sur le marché international ont fait perdre au Venezuela 99% de ses recettes en devises.

La Banque centrale du Venezuela (BCV), qui déclarait des revenus de plus de 56,6 milliards de dollars en 2013, a commencé à enregistrer une diminution continue de ses ressources à partir de 2014 jusqu’en 2020.

En 2014, les revenus étaient de 39,6 milliards de dollars, mais l’année suivante, ils atteignaient à peine 13,5 milliards de dollars. Le pire résultat a été enregistré en 2020, lorsque les contributions des entreprises publiques n’ont atteint que 477 millions de dollars.

Pour mettre en perspective l’ampleur des pertes, le pays a perdu quelque 56 milliards de dollars en 2020, par rapport aux recettes enregistrées par la BCV en 2013. À titre de comparaison, ce montant dépasse les 50 milliards de dollars approuvés par le Fonds monétaire international (FMI) « pour mettre fin à la pandémie mondiale » de covid-19.

Les Zones franches sont des espaces géographiques régulés par l’État vénézuélien qui disposent d’une réglementation spéciale pour leur activité. Elles peuvent être attrayantes pour les investissements étrangers car elles offrent des incitations de différents types (législatives, fiscales, etc.).

Elles sont généralement situées dans les ports, les aéroports, les frontières, les lieux où se trouvent des gisements de ressources naturelles, les zones industrielles et même les entreprises spécialisées.

Avec leur mise en œuvre, le gouvernement espère que les investissements générés dans les Zones franches contribueront à diversifier l’économie, à développer l’industrie, à approvisionner le marché intérieur et à augmenter les exportations, en vue de réduire la dépendance quasi exclusive vis-à-vis de l’industrie pétrolière.

L’économiste, député et président de la Commission des finances et du développement économique du Parlement vénézuélien, Jesús Faría, a expliqué à plusieurs reprises que ces Zones ne sont pas synonymes de marché libre ou de territoire où appliquer des « théories néolibérales », mais qu’elles fonctionneront comme des « moteurs » pour transformer l’économie vénézuélienne et promouvoir l’amélioration des infrastructures, des routes et des services dans les régions où elles sont situées.

Le cas vénézuélien tient compte des projets développés précédemment par des pays comme la Chine, le Vietnam, Singapour et la Corée du Sud, qui ont également eu des problèmes d’accès aux devises étrangères et ont été contraints de diversifier leurs exportations et leurs investissements industriels pour réactiver leur appareil productif, combler leur déficit et sortir de la stagnation.

Bien que le gouvernement défende l’urgence d’accéder à davantage de devises étrangères, le projet des Zones franches n’est pas exempt de critiques. Le député Oscar Figuera, dirigeant communiste, a expliqué dans des déclarations à Tribuna Popular — le média du PCV — que son parti n’avait pas soutenu la loi au Parlement car il la considérait comme un « instrument contraire à la souveraineté nationale et populaire ».

Pour Figuera, la loi est « une nouvelle menace » car elle « crée les conditions pour établir des zones sous le contrôle du grand capital transnational », à travers des régimes spéciaux, qui impliquent non seulement des exemptions fiscales mais aussi la « flexibilisation et la dérégulation des relations de travail au détriment des travailleurs ».

Oscar Figuera, secrétaire général du parti communiste du Venezuela | Twitter / PCV_Venezuela

Le député du Parti Communiste du Venezuela a qualifié la loi de « nouveau pacte des élites », une position que le parti maintient depuis le début des débats parlementaires sur la loi en 2021.

De son côté, le gouvernement insiste sur le fait que cet instrument permettra de « rétablir, renforcer et consolider la sécurité juridique nécessaire aux investissements publics, privés et mixtes, nationaux et internationaux », selon les termes du président Nicolás Maduro au milieu de l’année dernière, lorsque la loi a été approuvée en première discussion.

Selon le président, l’entrée en vigueur de la loi vise uniquement à « dynamiser la vie économique » du pays. En d’autres occasions, Maduro avait déjà déclaré que la négociation ne serait pas facile, car il ne s’agit pas d’une « loi de complaisance », mais d’un instrument « pour jeter les bases d’un nouveau modèle de développement national ».

Après l’adoption de la loi, le député Ramón Lobo a expliqué au média d’État VTV que les Zones franches sont des espaces territoriaux géographiquement délimités qui « cherchent à attirer les investissements pour développer le potentiel et le convertir en produits et services à plus grande valeur ajoutée », par le biais de la « diversification de l’économie », pour couvrir la demande intérieure et obtenir des revenus en devises grâce aux exportations.

M. Lobo a assuré que la loi offre également « l’équilibre » dont le pays a besoin, en termes de « résultat gagnant-gagnant », car elle facilite l’action de l’exécutif « pour surmonter la situation de guerre non conventionnelle, de guerre économique et de blocus commercial » auxquels le pays est confronté.

Bien que la loi ait déjà été approuvée par la majorité des parlementaires du pouvoir législatif, les autorités gouvernementales doivent encore définir le nombre, la nature et le lieu d’implantation des premières Zones, une fois la loi entrée en vigueur.

Au Venezuela, les autorités ont proposé plusieurs États pour la création de Zones franches. La plupart d’entre elles sont situées dans des régions côtières, frontalières ou avec un accès facile à d’importantes zones industrielles.

Après avoir été adoptée par le pouvoir législatif, la loi organique sur les Zones franches a été envoyée à la chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice (TSJ), afin que la plus haute instance judiciaire puisse analyser la réglementation et vérifier sa constitutionnalité, conformément aux dispositions de l’article 203 de la Constitution vénézuélienne.

Si le pouvoir judiciaire, qui dispose de 10 jours pour rendre sa décision après avoir reçu le document, estime que le texte juridique ne viole pas la Constitution vénézuélienne et approuve son caractère organique, le règlement passera au pouvoir exécutif, qui devra également donner son approbation dans un délai maximum de 180 jours pour qu’il entre en vigueur.

Source : Actualidad RT

     Traduction : Venesol