Après la trêve de Noël et du Nouvel An, les manifestations populaires réclamant la démission de la présidente Dina Boluarte, des élections anticipées pour 2023 et une nouvelle Constitution ont repris à travers le Pérou, jusqu’à présent sans les conséquences tragiques de décembre dernier.

Des milliers de Péruviennes et de Péruviens, dans tout le pays, ont entamé mercredi une grève illimitée pour exiger « qu’ils s’en aillent tous », à commencer par l’actuelle présidente Dina Boluarte et le Congrès « corrompu et putschiste », ainsi que l’appel à une Assemblée constituante et la libération du président destitué Pedro Castillo.
La police, ainsi que l’armée, ont maintenu le contrôle des infrastructures clés pour empêcher les actes de violence, bien que de multiples affrontements aient eu lieu. Dans le centre de Lima, la police nationale péruvienne (PNP) a lancé des grenades lacrymogènes sur des manifestants qui tentaient de rejoindre le Congrès après une mobilisation sur la place 2 de Mayo dans le Damier de Pizzaro, le centre historique de Lima.
Une vague de protestations a débuté au Pérou le 7 décembre à la suite de la destitution et de l’arrestation du président Castillo. Ces manifestations ont fait 28 morts dans des affrontements entre les manifestants et l’armée et six autres morts dans des accidents liés aux blocages.
Les analystes épinglent la figure du président du Congrès, José Williams Zapata, général à la retraite et leader d’un parti d’extrême droite, l’un des principaux instigateurs de l’éviction de Petro Castillo, qui semble profiter de la grève pour succéder à Dina Boluarte à la présidence du Pérou. Zapata est accusé de violations des droits humains, d’enrichissement illicite et de liens avec le trafic de drogue, selon la DEA américaine.
En 2021, il a été accusé de couvrir le massacre d’Accomarca, qui a eu lieu en 1985 et au cours duquel 69 paysans ont été assassinés. Selon la Commission de surveillance des banques, des assurances et des administrateurs de fonds de pension du Pérou, en 2006, M. Williams a été accusé d’enrichissement illicite, alors qu’il présidait le commandement conjoint de l’armée. Selon les médias mexicains, il était également impliqué dans le cartel de la drogue de Tijuana.
Le Bureau du Défenseur du Peuple a signalé que 30 provinces à travers le pays ont connu des actions de protestation collective, y compris des mobilisations, des arrêts de travail et/ou des blocages de routes. Les manifestations ont intensifié l’incertitude : la démilitarisation nationale est incertaine lorsque les forces armées et la police nationale sont l’un des piliers du gouvernement de Dina Boluarte.
Il a souligné que ce n’est pas à l’armée ou à la police de résoudre ce conflit. « Il est du devoir du gouvernement central et du Congrès de la République de trouver une solution avec un large consensus qui rétablira la paix et la tranquillité dans le pays », a-t-il déclaré dans son communiqué, ajoutant que ce n’est pas à l’armée ou à la police de résoudre ce conflit. « Il est du devoir du gouvernement central et du Congrès de la République de trouver une solution de large consensus qui rétablisse la paix et la tranquillité dans le pays ».
« Il n’est pas certain que les élections aient lieu en 2024, si les protestations s’intensifient, peut-être seront-elles avancées à 2023 et si le gouvernement est renforcé, il voudra rester jusqu’en 2026 ; l’émergence de nouvelles idées et de sang neuf dans un pays écrasé par la vieille classe politique qui a bloqué toutes les propositions de changement est très incertaine ».
Les manifestations anti-gouvernementales ont débuté de manière pacifique et dans une atmosphère tendue, avec quelques blocages de routes. Comme prévu, la région andine du sud de Puno a été la principale protagoniste de la journée. Dès l’aube, la route qui relie ce territoire à la Bolivie a été bloquée, y compris la route interocéanique, qui relie le sud de la côte péruvienne au Brésil.
Des arrêts partiels d’activités et des marches ont eu lieu dans les régions méridionales de Puno, Cusco et Arequipa, selon les informations en provenance de ces endroits, ainsi que dans les provinces d’Andahuaylas et d’Abancay, dans la région andine du sud d’Apurímac.
Dans une tentative de détourner l’attention de l’agitation interne, Boluarte a « regretté » une présumée ingérence de l’ancien président bolivien Evo Morales dans les affaires intérieures du pays et a déclaré qu’elle évaluerait, avec l’office de la migration, son entrée sur le territoire péruvien, étant donné que son intention était de promouvoir le séparatisme dans le sud du Pérou.
Le ministre de la Défense, Jorge Chávez, a déclaré qu’il dénonçait le fait que des personnes liées au trafic de drogue et à l’exploitation minière illégale soient à l’origine des protestations dans le sud du pays. Il a ajouté que les manifestations n’ont pas eu l’intensité de celles de décembre 2022, bien qu’elles aient eu une « plus grande portée » à Cusco et Puno. Le général Williams, chef du Congrès, a appelé mercredi à « éviter toute mesure de violence » dans les manifestations.
Boluarte a insisté sur le fait qu’il n’y aura pas d’impunité pour les responsables des morts lors des manifestations de décembre, elle a demandé une enquête rapide sur ces décès et l’identification des responsables, qu’elle laisse à la justice et à une enquête de la Commission interaméricaine des droits humains. Elle s’est énervée lorsqu’un journaliste a mentionné la responsabilité de l’État dans le nombre de morts en lui demandant si elle pouvait garantir qu’il n’y aurait pas d’autres pertes de vies.
Mariana Álvarez Orellana Anthropologue, enseignante
et chercheuse péruvienne, analyste associée au
Centre latino-américain d’analyse stratégique
(CLAE, www.estrategia.la).
Source : https://rebelion.org/incierto-futuro-para-un-peru-en-paro/